Y a-t-il des Pathosformeln dans la chanson de geste ?
Abstract
Un examen de l’épopée médiévale française révèle que, si l’expression verbale n’en est pas toujours rigoureusement formulaire, les gestes décrits ou auxquels il est fait allusion sont eux identiques en de nombreuses circonstances. Les gestes manifestant des émotions, tout comme les énoncés parlés ou écrits, sont une forme de communication entre les hommes et à ce titre ils sont conventionnels, ils peuvent être comparés à des formules. Sans doute le jongleur pouvait-il utiliser les mêmes gestes stylisés aux mêmes endroits du texte durant les performances, si bien que l’on peut parler dans la chanson de geste d’une notation des gestes, qui ouvre la possibilité d’une étude comparative des textes épiques et de l’iconographie médiévale. Pour ce faire, nous proposons de repartir de la notion de Pathosformel (ou « formule du pathos ») élaborée jadis par l’historien de l’art Aby Warburg. Les Pathosformeln, expressions artistiques ritualisées des émotions, se superposent comme une gestuelle affective au réseau des motifs rhétoriques et narratifs pour rythmer et structurer la chanson de geste.