, On peut, cependant, remarquer, au niveau textuel, une modification de l'ordre événementiel plus importante en C1 qu'en C2. Elle s'explique plus par les retours en arrière sur les images, plus fréquents en C1 qu'en C2, et par la part très importante des commentaires en C1 que par une possible différence de maîtrise de l'organisation du récit. Les corpora en l'état ne permettent pas de conclure sur ce point. Ils permettent simplement de noter qu'en C1 l'attention de Jeanne se porte essentiellement sur l'image et en C2 sur le texte. En C1, Jeanne cherche à comprendre la logique de la relation entre les images et le texte et donne son point de vue sur cette relation. En C2, elle prend appui sur les images pour restituer au mieux le texte original, près équivalents. On sait que, de ce point de vue, entre 3 et 4 ans, les différences entre enfants du même âge sont plus grandes que les différences entre groupes d'âges

. Mais,

, C'est dire combien la différence entre les deux récits se situe, avant tout

, histoire et dans la signification donnée à l'activité narrative par Jeanne, sa mère suivant sans rien imposer le mouvement de l'enfant, lui laissant occuper la place énonciative qu'elle souhaite. A 3 ans, pour Jeanne, raconter c'est prendre prétexte de l'histoire pour dire des choses à propos de ce qu'elle voit et partage avec sa mère. A 4 ans, le désir de montrer sa connaissance du texte domine

C. En, !. Une-formulation-conclusive, and J. , n'attendant pas la réaction de sa mère, se met à commenter la 3 ème de couverture, puis propose d'emblée de raconter une autre histoire : « Je vais te raconter l'histoire de Mimi la souris

C. En, Jeanne termine par le texte exact de l'histoire, se tourne vers sa mère, sourit largement et attend sa réaction (son évaluation ?) que la mère s'empresse de donner : « Bravo, Jeanne, c'est vraiment très bien !

, On notera, par exemple, que l'abandon en C2 d'une focalisation sur l'image au profit du texte a modifié nettement la prosodie du récit de Jeanne. La fluidité et la linéarité du discours qui caractérisent C2, marquent un apprentissage d'une norme du raconté « comme il faut » et tranchent avec les pauses, les retours en arrière caractéristique de C1. Le ton employé en C2 est bien celui d'une posture de narratrice avec une mise en scène de soi comme sujet racontant dont on peut penser qu'elle est empruntée aux adultes (la mère ? la maîtresse ?). En C1, Jeanne est dans une importante activité d'exploration de l'histoire. En C2, elle investit vraiment le rôle de conteuse. Si l'école a eu sa part d'influence sur cette évolution de la narration chez Jeanne, c'est qu'elle a joué son rôle de transmission de modèles de discours et, Cette différence et l'évolution de la narration chez Jeanne porte-t-elle des traces de sa scolarisation à l'école maternelle ? On peut en faire l'hypothèse, 2001.

D. Mais, . Le-même, and . Temps, on aimerait que cette nécessaire appropriation de modèles ne se fasse pas au détriment d'une liberté de prise de parole par l'enfant, tellement inattendue et source d'invention et de plaisir. Finalement, en C1, Jeanne mène diverses activités autour de son exploration de l'histoire. Elle observe et commente les illustrations, pose des questions sur ce qu'elle ne comprend pas, extrapole en commentant des éléments de l'histoire qu'elle sort de leur contexte, rentre en interaction avec les personnages, etc. Autant de détournements (du point de vue de l'adulte) du texte d'origine qui devient le lieu d'un foisonnement de jeux de langage. Mais on doit sans doute au genre narratif lui-même le double visage d'être tout à la fois le moyen d'une libre expression de soi et celui d'une activité langagière socialement identifiée et majeure. L'expérience enfantine du récit donne à voir, dans son appropriation

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