, Naples est riche non seulement de son passé historique mais aussi de cette géologie littéraire constituée par les strates des nombreux textes qui lui ont été consacrés. Mais l'objet a fini par phagocyter le sujet qui l'observe

. Le-problème-de-la-représentation-littéraire-d'une-ville, mais plus généralement de toute réalité, tient à cet écart qui s'insinue entre l'objet et le discours. Cet écart est de l'ordre de la déperdition -tension réaliste de la littérature -ou du trop-plein par accumulation et emphase : tension idéaliste ou sentimentale de la littérature avec un objet surinvesti par la nostalgie

, le rapport ne se fait plus tant entre une réalité -la ville -et son image qu'entre les représentations elles-mêmes. Parler de Naples revient toujours à parler des textes sur Naples. Car Naples est au coeur d'un étrange paradoxe : on la visite pour y retrouver ce que l'on sait d'elle sans l'avoir jamais vue. Le voyageur, sans toujours en être nécessairement conscient, arrive à Naples comme en terrain conquis, emportant dans ses bagages des images et des textes qui conditionnent sa vision et l'empêchent de se fixer librement. C'est pourquoi il lui est si difficile de découvrir, en toute indépendance, l'épaisseur d'une cité réelle, contradictoire et pour cela vivante. Naples est une ville qu'on reconnaît à défaut de la connaître, un palimpseste composé des nombreux textes que des visiteurs illustres lui ont dédiés. Naples n'est plus alors, au pire, que le réservoir d'idées préconçues et prêtes à l'emploi ou, au mieux, l'incarnation de désirs préalables qui n'ont rien à voir avec elle et dessinent une manière d'autoportrait, un paysage de l'âme du voyageur-écrivain. Ecrire sur Naples consiste à l'enterrer sous les références et les à priori. D'une certaine manière, l'intertextualité (le palimpseste dans notre lecture) a tué la géographie. La profondeur de la verticalité s'est réduite à une superficialité (à une surface) où le modelé de la diversité s'est trouvé aplati. C'est ce relief arasé par le stéréotype qu, Dans les deux cas -perte ou gain -, on retrouvera la même différence inaliénable qui existe entre un objet (ou un lieu, une personne) photographié et la photo elle-même. Le palimpseste peut faire office de lien entre l'objet et sa représentation mais, dans le cas de la littérature de Naples ou sur Naples

D. Raffaele-la-capria, M. Rea, L. Prisco, and . Compagnone,

E. De-filippo and . Su, manier la pique la plus efficace pour crever la baudruche du mythe napolitain : l'ironie, c'est-à-dire la juste distance avec soi-même et la faculté de voir Naples depuis la ligne de démarcation qui sépare l'étranger enfermé dans ses clichés et le napolitain étouffant dans sa « napoletanità», dans son obligation de « paraître napolitain ». L'ironie, qu'il convient de distinguer du sarcasme de l'étranger condescendant demandant au Napolitain de jouer sa pièce pour l'amuser, est la manière la plus efficace et la plus élégante pour montrer que les Napolitains ne sont pas dupes

, Bibliographie (succincte et subjective)

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