, La personnification est aussi une forme de recherche nostalgique d'une présence humaine dans les paysages ou les objets de l'univers. Mais comment un écrivain, c'est là sa différence inaliénable avec le scientifique, pourrait-il ne pas « giocare il vecchio gioco dell, p.59

, théorique (sa tentative de proposer une typologie des incipit littéraires 60 ), pratique (son attention portée sur les débuts de ses propres textes 61 ) que biographique : son obsession de changer en permanence son fusil d'épaule, son angoisse de rester cantonné dans un même genre stylistique, en somme sa volonté de toujours repartir à zéro 62 . Mais en réalité, Calvino écrivain est toujours d'abord un lecteur , des autres ou de soi-même -pensons au nombre considérable d'articles, préfaces ou interviews où il s'autocommente -pour qui écrire signifie tenter de corriger un texte préexistant : Perché scrivo ? (?) Perché sono insoddisfatto di quel che ho già scritto e vorrei in qualche modo correggerlo, completarlo, proporre un'alternativa. In questo senso, non c'è stata una «prima volta» in cui mi sono messo a scrivere. Scrivere è sempre stato cercare di cancellare qualcosa, Au terme de ces quelques remarques, il apparaît que Calvino est un écrivain que la question du ou des commencement(s) n'a cessé d'habiter, tant sur le plan historique (ses textes sur le mythe ou l'évolution de l'écriture), p.63

, Remarque qui nous permet d'évoquer une ultime figure où s'exprime une dialectique entre le mythe d'un commencement absolu qui ne peut exister en littérature et la volonté calvinienne d'éviter le risque de la répétition ou du livre unique : le palimpseste. Le palimpseste fonctionne sur le principe d'une strate infinie de textes accumulés, disposés comme dans une réserve où puiser des fragments de récits, des fantômes de personnages, des structures narratives dont la présence muette rend caduque la notion même d'exorde 64 . Ce qui stiamo attraversando apre un'epoca ideale per parlare e pubblicare il meno possibile e cercare di capire meglio come sono fatte le cose », Una pietra sopra, p.145

». «-due-interviste-su-scienza-e-letteratura and U. Pietra, A rapprocher de ce passage de la leçon « Visibilità » consacré justement aux Cosmicomiche, in Una pietra sopra, op. cit., p. 706 : « la scienza m'interessa proprio nel mio sforzo per uscire da una conoscenza antropomorfa ; ma nello stesso tempo sono convinto che la nostra immaginazione non può essere che antropomorfa, p.233

. Curieusement, il manque dans les articles de Calvino une réflexion approfondie sur les titres qui sont un autre élément du paratexte, d'époque relativement récente, qui propose une entrée dans l'oeuvre. De même la critique a-t-elle peu étudié la nature des titres calviniens, à l'exception de Nathalie Roelens in L'odissea di uno scrittore virtuale, op. cit. Disons que Calvino privilégie les titres énigmatiques

, Cette lacune volontaire peut être facilement comblée car la critique a souvent procédé à l'analyse de commencements narratifs. Citons entre autres Robert Perroud, « Se una notte d'inverno un viaggiatore, d'I. Calvino : combinatoire et confession, A de très rares allusions près, nous n'avons pas voulu alourdir cet article en proposant une étude systématique de quelques incipit des textes de Calvino, pp.237-250, 1981.

C. Milanini, « Natura e storia nel Sentiero di I. Calvino », Belfagor n°5, 30 sett, pp.529-546, 1985.

N. Roelens,

D. Scarpa, I. Calvino, B. Milan, and . Mondadori, Le memorie difficili, 1999.

A. Del-lungo and L. Romanesque, par l'auteur, de Gli inizi difficili, Padoue, 1997) où, en plus d'une étude historique et narratologique de l'incipit, plusieurs pages sont consacrées à Calvino, 2003.

D. Comme-l'écrit and . Scarpa, « Calvino è uno scrittore di ricominciamenti, di ripartenze da zero, di messe in gioco del capitale intero a ogni nuovo giro di roulette, p.73

«. Perché-scrivete-?-» and O. , , p.1863

, Le città invisibili, Tecla représente la ville dont l'édification ne s'arrête jamais, ce qui est le contraire de la ville muséale. Marco Polo est un autre voyageur fasciné par les villes qu'il visite mais, est enfoui est pourtant là, caché, accessible. Dans une formule très borgésienne -« La letteratura è ricerca del libro nascosto lontano, che cambia il valore dei libri noti, è la tensione verso il nuovo testo apocrifo da ritrovare o da inventare » 65 -Calvino met le doigt sur cette contradiction : inventer l'existant. De manière ironique, il avait déjà évoqué cette aporie propre à la littérature dans une formule restée célèbre de la Préface de 1964 à la réédition du Sentiero dei nidi di ragno : « il primo libro sarebbe meglio non averlo mai scritto » 66 . Mais quelques lignes auparavant, Calvino avait écrit : Forse, in fondo, il primo libro è il solo che conta, forse bisognerebbe scrivere solo quello e basta, il grande strappo lo dai solo in quel momento, l'occasione di esprimerti si presenta solo una volta, La notion de palimpseste peut aussi s'appliquer aux villes. Calvino voyageur est fasciné par New York, ville sans passé, aérienne et spéculaire, où tout est à écrire, alors que Paris et Rome sont des capitales figées par le poids de leur histoire, p.67

, Tel le bateleur du jeu de tarots devenu personnage du Castello dei destini incrociati, Calvino jongle avec les contraires et finit par en supprimer l'antagonisme, exactement comme il le fait dans la Préface de 1964 où il manipule le lecteur et fait disparaître son opinion derrière l'hésitation savamment organisée de son propos. S'impose alors le mouvement perpétuel de la littérature qui s'absout de la question réductrice du commencement et de la fin pour se superposer exactement au monde dont elle propose la représentation. Ce mythe est récurrent dans l'oeuvre de Calvino comme le montre « L'avventura di un fotografo » 68 où le protagoniste, Antonino Paraggi, est pris d'une frénésie qui confine à la folie et qui le pousse à vouloir photographier tous les instants de sa vie. C'est sa manière de (ne pas) résoudre la question du passage entre monde réel et monde représenté. Son geste répété traduit une inaptitude à distinguer le début et la fin avec la suppression du principe de sélection que cela implique puisque tout doit être fixé par l'image. Paraggi ne se situe pas dans la figure apaisante du cercle mais dans celle beaucoup plus inquiétante d'une fuite en avant forcément tragique due à son impuissance à limiter son activité, Comment concilier ces deux propositions apparemment si contradictoires ? Par la figure du renversement carnavalesque qui s'impose presque malgré nous comme le fil rouge de ces quelques remarques. Le noeud, ici au coeur

, Calvino déclarait d'ailleurs : « il viaggiare non serve molto a capire, ma serve a riattivare l'uso degli occhi, la lettura visiva del mondo ». Voyager, c'est à la fois rester et partir, comme l'indique symboliquement le nom d'Amerigo Ormea, protagoniste de La giornata di uno scrutatore (1 ère édition Einaudi, vol.1, 1960.

, « La letteratura come proiezione del desiderio » in Una pietra sopra, p.251

. Récit-de-gli and . Difficili, réécriture fictionnelle en 1970 d'un article de 1955. Le recueil à été publié en 1970 par Einaudi, Désormais in Romanzi e racconti, vol.2, 1992.

«. Définir and ». Confins, sont des mots issus de la même étymologie. Définir c'est précisément mettre des limites