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Article Dans Une Revue Nunc Année : 2007

La patience du commencement

Emmanuel Housset

Résumé

Le pas lent du montagnard l'enseigne : la marche n'est pas un simple challenge que l'on se propose à soi-même et au commencement du chemin notre corps n'est pas là devant le poteau indiquant la destination et la durée du trajet, mais il est déjà là-bas où les hauteurs l'appellent. C'est à cette condition que dans la marche on rencontre autre chose que soi, c'est à cette condition qu'elle est un commencement et une élévation de notre être tout entier qui à chaque pas s'étonne du surgissement des choses et les remercie de se manifester dans cette prière corporelle. Commencer à marcher, ce n'est donc pas se précipiter d'un point de départ vers un point d'arrivée, mais c'est au contraire consentir à cette lenteur par laquelle chaque pas est un commencement car il est une réponse à la révélation du monde. En effet, le commencement n'est pas un simple point de départ qui s'épuise dans sa place et qui disparaît au fur et à mesure que l'on va de l'avant. Il est toujours possible de se demander quel est le point de départ d'une amitié, c'est-à-dire quelles sont les conditions contingentes, par exemple de date et de lieu, dans lesquelles celle-ci a débuté, néanmoins c'est tout autre chose de se demander quel est le commencement d'une amitié, quelle est la promesse inavouable qui a lié deux existences. Le commencement est ici de l'ordre de la rencontre, de l'être avec autrui qui ouvre un horizon et donne un avenir. Dans un autre ordre, les hommes de science peuvent bien s'interroger sur le point de départ de notre univers et régresser ainsi indéfiniment vers une nouvelle cause première, mais le récit de la Bible, qui ne prétend pas rivaliser avec de telles explications, cherche lui a élucider le commencement : il s'agit de s'interroger sur le sens de ce qui a commencé avec la création du monde, sens auquel il s'agit de demeurer fidèle. Enfin, Husserl, dans L'origine de la géométrie, nous apprend aussi à distinguer l'origine du simple point de départ historique factuel de la géométrie, qui comme tout début factuel ne possède qu'une détermination relative. Le commencement absolu de la géométrie s'identifie avec l'instauration d'un sens qui donne toute son unité à cette histoire qu'est la géométrie. Le sens originaire de la géométrie n'est pas ce qui serait aboli par le développement de celle-ci, mais il est ce que tout géomètre doit sans cesse réactualiser pour être conscient de sa tâche propre. On voit que le commencement est ici un acte fondateur premier qui n'est lié à aucune date factuelle et auquel il s'agit toujours de revenir pour continuer d'en dévoiler le sens.

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Citer

Emmanuel Housset. La patience du commencement. Nunc, 2007, 13, pp.33-39. ⟨hal-02138176⟩
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